Alors que le programme de Segolène Royal obtient plus de 16 dans sa notation par les associations environnementales regroupées autours de Nicolas Hulot, N Sarkozy obtient 8,5...
La bonne fois et le bon sens auraient donc voulu que Hulot appelle clairement à défendre Ségolène Royale qui a mis réellement l'écologie au coeur de son pacte écologique... Mais rien de tel. Hulot fait comme si les deux programmes étaient les mêmes. Quelle lititote "Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy présentent deux projets de société. Au delà de leurs différences marquées et malgré les incontestables inflexions écologiques, certes inégales, apportées à leurs programmes respectifs, ils présentent le même objectif : intensifier la croissance des productions,"
Après avoir tué l'écologie politique Hulot s'apprête donc à faire le jeu de Sarkozy.... La menace de la perte possible de son boulot sur TFI y est surement pour quelque chose. Surtout quand on sait que Bouygues est le parrain des enfants de Sarkozy.... C'est à vomir.
Voici son texte.
Édito de Nicolas Hulot
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Je ne lâcherai pas la proie pour l’ombre
L’indépendance n’est pas l’indifférence. En refusant de prendre publiquement position pour Ségolène Royal ou pour Nicolas Sarkozy, comme on m’y presse de tous côtés, je ne souhaite nullement gommer les différences politiques qui s’expriment. A titre personnel, je ne suis pas insensible à ces différences et d’ailleurs, pour ce qui concerne celles-ci sur le plan écologique, j’ai publié en toute clarté, avec le Comité de veille écologique, mes appréciations sur le site du Pacte écologique. Il suffit de les lire.
Je tiens seulement à ne pas outrepasser mon rôle. Conformément à ce que j’ai toujours dit, je n’ai pas vocation à dicter des consignes aux consciences. Il n’y a aucun mépris de ma part vis-à-vis des engagements partisans - légitimes et inhérents à la démocratie - mais la conception que j’ai de la responsabilité qui m’échoît et que les circonstances m’ont donné est autre. Je mène un combat de conviction qui, par nature, m’oblige à rester orienté vers la société toute entière, à parler à tous, à chercher à convaincre chacun, à rassembler les énergies, quelques soient les héritages idéologiques. En m’alignant au dernier moment sur un camp ou sur un autre, en aliénant ma liberté de jugement et mon indépendance d’action, en me « normalisant » en quelque sorte, je compromettrai l’universalité et la transversalité de la cause écologique que j’incarne à ma façon.
Pour moi, l’enjeu écologique - c’est-à-dire le choix d’avenir que l’humanité doit faire si elle veut encore s’épanouir dans un monde vivable - se situe politiquement au delà du champ traditionnel de l’affrontement droite-gauche. Il invite à une métamorphose de la civilisation. Si la condition humaine doit encore progresser, il lui reste à s’émanciper des réflexes économiques et de l’imaginaire culturel qui sacrifient le milieu de vie aux manières et aux raisons de vivre dominants. Je ne peux donc réduire cet enjeu historique à une posture électorale ponctuelle.
Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy présentent deux projets de société. Au delà de leurs différences marquées et malgré les incontestables inflexions écologiques, certes inégales, apportées à leurs programmes respectifs, ils présentent le même objectif : intensifier la croissance des productions, des consommations et des déplacements sans s’interroger sur leur contenu. Or, la mutation écologique est incompatible avec cette approche quantitative. L’ardente nécessité de préserver les équilibres et les ressources naturelles nous contraint à imaginer d’autres façons de produire, de consommer, de se nourrir, de se déplacer, de se loger, de travailler, de commercer, d’innover technologiquement, d’organiser la recherche scientifique, de répartir taxes et impôts, de comptabiliser les richesses. Orienté vers une finalité du mieux être plutôt que du plus avoir, le projet d’une société écologique est d’une toute autre nature que ceux qu’on nous soumet. C’est cette singularité que j’entends préserver pour les échéances futures en évitant de les réduire à un épisode électoral passionnel.
Tout au long de la campagne présidentielle, je me suis efforcé, avec d’autres, d’ouvrir le débat politique à cette dimension qui n’est pas une thématique parmi d’autres puisqu’elle sous-tend et détermine l’essentiel des choix économiques et sociaux à opérer. Autour du Pacte écologique, une prise de conscience s’est accélérée, une formidable disponibilité de la société s’est faite jour, des énergies se sont libérées, une mobilisation s’est enclenchée. C’est pour moi l’essentiel. Une mutation de cette ampleur ne s’opérera pas sans que l’ensemble de la société n’y participe en pleine lucidité et responsabilité. Ce n’est donc pas au dernier moment que je lâcherai la proie pour l’ombre en devenant le supplétif d’une fraction de l’opinion ou en laissant croire que la détermination d’un homme ou d’une femme providentiels suffira seule à inverser la logique dominante.
C’est l’après 6 mai qui m’intéresse. Quel(le) que soit l’élu(e), il s’agira pour moi de continuer à ouvrir l’espace de l’impératif écologique au cœur du politique et de la société. Si je veux encourager la mobilisation durable de tous ceux qui ont individuellement rejoint notre démarche (750.000 citoyens ont aujourd’hui adhéré au Pacte écologique), des associations qui partagent nos objectifs, des syndicalistes et des acteurs économiques qui s’ouvrent à nos préoccupations, des élus et des militants politiques qui sont sensibles à ce défi, mon indépendance constitue mon outil le plus précieux.
Le Monde, 5-6 mai 2007